Cette colonisation a malheureusement en peu de temps anéanti les premiers habitants des lieux, chasseurs cueilleurs ou pêcheurs. Pour en savoir un peu plus sur les Tehuelche, Selk’nam, Haush, Alakaluf et Yamana:
A 17 heures, nous partons pour deux heures vingt de traversée du mythique détroit de Magellan. Le ferry se remplit très vite, essentiellement de jeunes qui retournent au lycée à Punta Arenas. Un Chilien, béret noir à la Guevara sur la tête, vient s'asseoir à côté de nous, et engage rapidement la conversation en nous entendant parler français. Réfugié politique, il a fait ses études en France puis s'est installé en Suède où il vit toujours, comme thérapeute familial.
Les vagues sont de plus en plus grosses, par moments le ferry tressaute tout entier avec de violents craquements et l'on est ensuite tout étonnés de voir qu'il ne s'est pas brisé en deux. Nous parlons pendant toute la traversée, de tout, mais lorsque nous abordons discrètement le problème de la dictature, notre voisin chilien n'émet plus qu'un murmure à peine audible et change de sujet... Cette conversation a en tout cas pour effet de calmer radicalement le mal de mer d'Alain, qui ne pense plus ni au roulis ni au tangage.
16 heures. Nous sommes à l'embarcadère, à cinq kilomètres de Porvenir. Il n’y a qu’un 4 x 4 sur le parking. C’est en vain que nous cherchons le bureau où l’on prend les billets, et nous apprenons que la vente se fera dans la maison de bois légèrement délabrée que nous avons en face de nous, dix minutes avant le départ du ferry.
Toutes les coordonnées sont sur la photo...
Por una vida sin malas tratos, no + violencia contra la mujer...
Nous passons les temples grecs et ressortons, car il est bientôt l'heure d'aller à l'embarcadère. Un tour à la plaza de Armas (au Chili et en Argentine, chaque village ou ville a sa plaza de Armas, au milieu de laquelle trône une statue ou un monument).
A l'écart, les tombes des moins nantis couvertes de fleurs artificielles. Là, plus de mur d'enceinte mais une simple barrière.
Qui aurait pensé trouver un lit dans un cimetière? Mais ici, tout est possible...
Il y a de nombreuses croix inclinées au-dessus des tombes.
Le cimetière est extraordinaire, toutes les formes d'architecture sont représentées. Il y a même, le long du mur d'enceinte, de chaque côté du portail d'entrée, de curieuses petites cases vitrées entassées les unes sur les autres, avec photos, fleurs, etc., prolongées par les tombes.
Et là, dès l'entrée, on peut voir qu'un peu plus d'un mois après le coup d'Etat de septembre1973, les escadrons de la mort étaient venus traîner leurs guêtres jusque dans ce village du bout du monde.
De fil en aiguille, nos pas nous mènent au cimetière, sur les hauteurs de Porvenir...
Porvenir est une ville, curieusement dans cette partie du monde, à fort pourcentage croate. En 1880, les mines d’or récemment découvertes leur ont fait quitter les rivages lointains de l’hémisphère Nord pour tenter leur chance du côté des terres solitaires et fouettées par les vents du 53e parallèle. Sont venus les rejoindre des habitants de l'île de Chiloe et, même s'ils n'ont pas fait fortune, ils ont trouvé du travail dans les estancias dont la plupart des habitants, aujourd’hui, sont des descendants de ces pionniers.
Les Chiliens aiment bien transformer en cloches les cyprès qui bordent les rues
J 7 - Dimanche 28 novembre
Nuit douillette sous les épaisses couvertures. Dire qu'on est presque en été...
A 16 heures nous prendrons le bateau pour rejoindre Punta Arenas, de l'autre côté du détroit de Magellan, après deux heures vingt de traversée. Du moins nous espérons avoir une place car nous n'avons pas réservé. En attendant, que faire? Nous projetions d'aller sur les pistes environnantes mais le risque de crevaison juste avant de prendre le ferry nous fait reculer. Un Coréen du Sud, « businessman » de centollas – ou King Crabe – comme il se décrit lui-même, habitué des lieux, négocie avec Alberto, l'hôtelier, de pouvoir rester dans la salle de restaurant, puisque le dimanche le restaurant est fermé, et nous dit de faire de même. Excellente idée et qui nous arrange bien! Entre lecture et Internet, nous l'écoutons parler de lui (dans un anglais à l'accent pour le moins original), des très nombreux pays qu'il a visités, des ventes extraordinaires qu'il a faites, de son hygiène de vie incomparable, de son âge qu'on ne soupçonnerait jamais... Dehors, de jeunes militaires passent et repassent sous les fenêtres, montent la rue et la descendent, nous ne savons s'ils sont en permission et s'ennuient ou s'ils sont en exercice.
Il est maintenant plus d'une heure et demie et, arrivés à ce point de la journée, désormais totalement convaincus des qualités exceptionnelles de l'homme d'affaires coréen, nous décidons d'éviter l'overdose et d'aller « visiter » Porvenir en attendant l'ouverture de la compagnie maritime.
Patagonie australe
El fin del mundo ou le Pays du vent