Au sol, une quinzaine de petits azurés, ces si jolis papillons qui ont pratiquement disparu des chemins de France sur lesquels ils se rassemblaient par dizaines il n'y a encore pas si longtemps. (Merci encore une fois à Todd L. Stout, de l'Utah Lepidopterists' Society, pour l'identification.)
(Glaucopsyche lygdamus oro)
Enfin, une éclaircie en arrivant à Mammoth Hot Springs...
Low Larkspur (Delphinium bicolor)
Nous quittons Cooke City pour Mammoth Hot Springs, à plus de 80 km. En redescendant sur les limites du parc, un orage de grêle terrible s’abat sur nous, il fait soudain quasiment nuit, des éclairs bleutés traversent le ciel en tous sens. C’est à ce moment-là que nous nous arrêtons à la cabane des rangers. Nous donnons notre pass mais, contrairement à d’habitude, la ranger fait du zèle, c’est bien le moment, alors qu’autour de nous c’est l’apocalypse ! Elle trouve que la signature ne correspond pas à celle du passeport bien qu’elle soit au contraire rigoureusement identique. Au bout de plusieurs minutes nous commençons à perdre patience. Ne trouvant finalement rien d’illégal, elle nous tend pass et passeport que nous reprenons sèchement sans un mot avant de démarrer sur les chapeaux de roues.
Plus loin, alors qu'il pleut toujours à verse, nous nous arrêtons pour observer un wapiti aux bois tout neufs.
A l’intérieur du Trading Post, nous avons la surprise de découvrir une petite pièce, sur la gauche, qui renferme une véritable arche de Noé : orignal, lynx, blaireau, carcajou, raton laveur, martre, mouflon, chèvre de montagne, wapiti, cerf de Virginie, puma, etc. Mais au bout de quelques minutes nous voyons aussi un écriteau qui nous avait échappé, sur la porte: Entrée, 7 $ par personne, car cette minuscule pièce est en fait le wildlife museum local. Nous trouvons que c’est hors de prix pour un coup d’œil circulaire sans même bouger un pied et ressortons comme nous sommes rentrés. D’ailleurs aucune des trois personnes de l’accueil ne nous a demandé quoi que ce soit.
Bon, décidément ça sent trop l’hiver par ici, nous redescendons sur Cooke.
A la sortie, nous sommes bloqués un moment par des travaux et avons tout le loisir d’observer les ravages des incendies passés. Tout a brûlé depuis notre dernier passage il y a une dizaine d'années. La piste du col (Lulu Pass) est en chantier, d’énormes camions vont et viennent, nous faisant rapidement abandonner l’idée de circuler parmi eux… Nous poursuivons la route dans les bois, passons le Big Moose Resort fermé en cette saison et atteignons le col suivant; la neige s’amasse sur les bas-côtés et au pied des grands sapins noirs, la température est glaciale et le silence feutré, mais nous sortons quand même de la voiture, intrigués par les silhouettes de métal qui chevauchent en lisière de forêt. Ce sont des Nez-Percés…
Sous un ciel plombé, nous dépassons Cooke City, Montana, triste alignement de maisons le long de la route, pas un chat dehors, le silence… Le village, niché dans les montagnes dont les sommets dépassent tous les 3000 mètres, respire le prospecteur par tous les joints de ses habitations en planche... La webcam donne une idée de l’atmosphère qui y règne : http://64.82.6.189/netcam.htm (prendre en compte le décalage horaire). Nous remarquons d’ailleurs sur les images d'hiver que le Trading Post décroche toutes ses décorations de façade. Ci-dessous, au mois de juin...
Une aire de stationnement, sur la droite – apparemment réservée aux pêcheurs... absents – et un chemin qui mène au bord de la rivière. C'est l'occasion d'aller voir de près couler la Lamar.
... et des cascades de glace sont encore visibles au pied des pentes abruptes.
Le printemps s'annonce timidement, les trembles commencent tout juste à avoir leurs premières feuilles...
Dans ces cas-là, on n'est jamais seuls bien longtemps...
La route suit le fond de Lamar Valley, qui s’élargit avant de se faufiler entre les montagnes dont les sommets atteignent tous plus de 3000 mètres d'altitude. C'est l'endroit que nous choisissons pour pique-niquer.
J’en profite pour jeter un œil en contrebas de la route, histoire de voir… et là, à deux mètres, un énorme bison est en train de brouter ! Je sais qu’ils sont chatouilleux et que je suis bien trop près, donc je n’insiste pas, mais lui tire quand même le portrait!
Mountain Death Camas (Zigadenus elegans)
Il y a aussi à cet endroit des fleurs qui ressemblent à celles du thé du Labrador (Ledum groenlandicum) que l'on ramassait sous des nuées de petites mouches noires du côté de Saint-Augustin, dans le nord du Québec, tandis que le Nordik Express, porte-containers qui ravitaille les villages isolés de la côte de Duplessis, déchargeait ses palettes.
En fait ce n’est pas du thé, mais des Mountain Death Camas, de la famille du lilas.
Au détour d'un virage, alors que la route se rétrécit, nous apercevons un pan de roche qui tranche complètement avec la couleur grise de celles qui l'entourent.
... là, des bisons, toujours accompagnés, lorsqu'ils broutent, des Brown-Headed Cowbirds, autrement dit des vachers (et vachères) à tête brune.
Donc, il y a beaucoup de monde dans Lamar Valley – que nous ne reconnaissons pas, ou du moins le souvenir que nous en avons est totalement déformé. En 2000 elle était déserte et là, sur les premiers kilomètres, les voitures se suivent de manière ininterrompue.
Ici, des pronghorns...
Mais je suis bien obligée de bouger, et là je deviens de plus en plus intéressante, ce qui ne m'empêche pas de le prendre en photo. Finalement, c'était un mouflon très relax, il n'a pas bronché.
... et le Bighorn trouve que j'en prends un peu trop à mon aise et bouge lentement la tête dans ma direction, ce qui a pour effet de me scotcher dans la sauge!
Pasque Flower (Anemone patens)
J'ai repéré, alors que je suis à une dizaine de mètres de lui, des fleurs que je veux photographier. Je m'avance, toujours accroupie, très lentement, avec des ruses de Sioux...
... de colonnes basaltiques que l'on dirait posées exprès là pour retenir la pente (et qui d'ailleurs la retiennent)...
Les rives de la Yellowstone sont hérissées de flèches...
Nous dépassons Tower Lodge où nous avions dormi en 2000, dans une cabane en bois petite mais agréable, avec un poêle à bois, mais sans salle de bains ni w-c, et bifurquons vers l'est.
Il y a beaucoup de monde sur la Beartooth Hwy, beaucoup de monde en tout genre : hommes, mais aussi Bighorn Sheep (celui-ci je le soupçonne de poser pour la postérité tous les jours au même endroit, sous son arbre, indifférent, le regard perdu sur la – très lointaine – ligne bleue des Vosges...).
... ou hautes colonnes de section carrée que l'on découvre sous une épaisse toison qui ressemble un peu à celle d'un yack en train de muer (comme j'en vois tous les jours, je peux en parler ;-).
Je photographie à tour de bras et les quelques personnes qui se sont arrêtées derrière nous, après m'avoir observée et avoir eu un moment d'hésitation, prennent leur appareil et se mettent elles aussi à mitrailler la falaise.
Plus loin le basalte domine : croustillant anthracite dans lequel on aurait presque envie de croquer...
Sur le grand parking de Tower Falls, nous discutons avec un jeune Blackfeet, militant de Buffalo Field Campaign (http://www.buffalofieldcampaign.org/), de bisons, bien sûr, mais aussi de cuisine française, et nous en profitons pour lui donner nos coordonnées et l’inviter, s’il passe par Paris, à venir dîner chez nous. Puis nous prenons le chemin des chutes mais, presque arrivés en bas, nous nous cassons le nez sur une barrière à laquelle est accrochée une pancarte : « Fermé pour travaux», sans aucune possibilité d’apercevoir la moindre éclaboussure. On aurait assez apprécié que la pancarte soit mise plutôt à l’entrée du chemin qu’à la fin… Nous nous contentons des eaux gris-vert de la Yellowstone River. (Une fois à Paris, je verrai sur Internet qu’en 2006 et même en 2003, la situation était la même. Comme il y a foule à vouloir voir les chutes de près et donc à s'arrêter, on peut supposer que si l’information était donnée ne serait-ce qu’au Visitor Center, les gens fileraient tout droit et le General Store du parking n’aurait plus qu’à fermer boutique.)
Nous apercevons de loin les Tower Falls, aussi belles sinon plus que les Lower Falls, dans le Canyon de Yellowstone.
Nous avons de la chance, la route est ouverte alors que la neige est encore amassée dans les bas-côtés. Mais la petite route de 9,5 miles qui mène au Chittenden parking area, d’où part le sentier pour le Mt Washburn, est, elle, fermée. Le chasse-neige est d’ailleurs en train de s’activer pour déblayer.
Yellowbell (Fritillaria pudica)
La route qui mène à Tower Roosevelt est une belle route d’altitude, fermée de début novembre à fin mai. Sur les bords, une de mes fleurs préférées.
Yellowstone, Lamar Valley, Beartooth Hwy
J 28 - Vendredi 5 juin
Nuit calme et réveil sous un ciel bleu vite voilé par des nuages blancs. Nous plions bagage et quittons sans trop de regrets cet environnement de caserne, où l’épicerie ferme à 17 heures et où la cafétéria est plus que passable.
Sur le parking on voit toutes sortes de plaques, dont celle-ci qui vante les pommes de terre de l'Idaho qui sont servies dans toutes les cafétérias des parcs nationaux. J'ai bien sûr effacé le numéro, on ne sait jamais, je n'ai pas envie de me retrouver dans un procès à 500 000 000 de dollars!...
Boucle Salt Lake City - Salt Lake City via Yellowstone